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Antoine Comte

Bonjour et bienvenue dans ce blog PTJAB

Aujourd’hui, nous allons explorer l’utilisation de l’haltérophilie en rééducation.

Comment ce sport de force peut-il aider à améliorer mobilité, coordination et force chez les patients ?

Quels sont les bénéfices et les prérequis pour intégrer ces exercices dans un programme de rééducation ?

Découvrez-le dans cet article !

 

     Introduction

     L’haltérophilie est un sport de force, où l’athlète cherche à soulever la charge la plus lourde possible sur deux mouvements poly-articulaires : l’arraché et l’épaulé jeté (figure 1 et 2).

Figure 1 . Arraché

Source des images : Storey, A. and Smith, H.K., 2012. Unique aspects of competitive weightlifting: Performance, training and physiology. Sports Medicine [Online], 42(9), pp.769–790. Available from: https://doi.org/10.2165/11633000-000000000-00000.

Figure 2 . Épaulé jeté

     La réussite de ces mouvements nécessite des prérequis en mobilité, en force et en contrôle moteur importants, mais ils constituent aussi un excellent moyen de développer ces qualités (Suchomel et al., 2015; Suchomel et al., 2020). En effet, les mouvements complets, qui sont réalisés en compétition, peuvent être séparés en de très nombreuses séquences que l’on appelle des semi-techniques (Figure 3 et 4). Bien choisis, ces semi-techniques permettent de s’adapter aux capacités et aux objectifs fixés en rééducation.

Figure 3. Exemple de semi-technique : jump shrug   

Ici, on exécute à nouveau un départ en suspension au-dessus du genou et on demande à l’athlète de sauter le plus haut possible avec la barre. Le focus est alors mis sur la triple extension et la capacité à accélérer son propre corps avec une charge additionnelle.

Figure 4.Exemple de semi-technique : tirage haut d’arraché – départ en suspension haute

Le mouvement ne démarre pas du sol, mais avec la barre au-dessus des genoux. L’exercice se concentre alors sur l’exécution d’une triple extension complète et agressive, suivie d’un tirage des bras qui permet à la barre de garder sa trajectoire verticale. L’athlète ne réceptionne pas la barre au-dessus de la tête comme sur un arraché complet, ce qui enlève une partie technique complexe.

   

Spécificité des mouvements d’haltérophilie

     Un mouvement d’haltérophilie se caractérise par la recherche de verticalité et d’explosivité pour accélérer une charge (Storey and Smith, 2012). Ceci constitue un excellent entraînement pour travailler sur les points suivants :

  • La triple extension des membres inférieurs
  • Le renforcement des extenseurs lombaires
  • Le travail des muscles du tronc afin de transférer la force des membres inférieurs vers les membres supérieurs
  • Le renforcement des membres supérieurs en tirage et en poussée
  • La mobilité et la stabilité des épaules en position de réception

     Cette liste non-exhaustive permet de voir que de la même manière que les exercices de musculation traditionnels, les exercices d’haltérophilie permettent de stimuler des capacités précises chez les patients, si elle est utilisée à bon escient.

     A travers ce blog, nous allons chercher à répondre à quelques questions concernant le lien entre cet outil et la rééducation :

   

1 .A qui l’haltérophilie peut bénéficier en rééducation ?

     Tout patient qui aurait des bénéfices à suivre une rééducation active peut bénéficier d’exercices inspiré de l’haltérophilie. Dès lors que les exercices semi-techniques sont bien choisis et que le patient respecte les prérequis décrits juste après.

   

2. Quels sont les prérequis pour en bénéficier ?

  • L’ENVIE

Le patient doit avoir envie d’apprendre de nouveaux mouvements et de s’exposer à ce nouveau type de travail. Sans cela, une infinité d’autres exercices existent qui permettront d’atteindre les même objectifs.

  • UN ENCADREMENT

Les exercices d’haltérophilie présentent de nombreux avantages, mais il faut être en capacité de guider correctement les patients dans leur réalisations pour qu’ils puissent en tirer un bénéfice. L’éducation à l’haltérophilie doit d’abord se faire auprès de coach diplômés afin de bien saisir les clés d’un mouvement réussi.

  • MOBILITÉ

Le patient doit avoir les amplitudes articulaires passives et actives requises pour réaliser l’exercice souhaité. Par exemple, si le patient a du mal à avoir les épaules au-dessus de la tête en overhead squat, qui est une position très exigeante, alors apprendre à réceptionner la barre au-dessus de la tête avec la jambes tendues, ou en quart de squat, peut être un bon moyen de travailler progressivement sur cette amplitude difficile.

  • FORCE

Le patient doit être capable de générer un minimum de force dans la position de départ et dans la position d’arrivée de l’exercice. Par exemple, si un patient n’a pas la musculature du tronc suffisante pour maintenir son gainage dorso-lombaire en voulant soulever une charge du sol, peut être qu’un départ au-dessus du genou lui permettra de renforcer sa musculature lombaire avec un bras de levier moins importante sur cette zone. Avec pour objectif de démarrer de plus en plus en bas au fur et à mesure de sa progression.

  • CONTROLE MOTEUR

Le patient doit être en mesure de comprendre et d’exécuter le mouvement a une vitesse convenable. Si l’on souhaite travailler la triple extension des membres inférieurs d’un patient lors d’un tirage, il faut s’assurer que le patient ne tire pas la barre le plus haut possible grâce à la force de ses bras, mais bien grâce au travail de ses jambes. Il faut aussi prendre en compte que si c’est la vitesse du mouvement qui l’empêche de coordonner ces différentes actions, une adaptation des consignes ou de l’exercice sera requise.

   

3. Quels sont les bénéfices potentiels d’exercices d’haltérophilie par rapport à d’autres ?

     Note importante : Stricto-sensu, aucune donnée ne nous permettrait de dire que l’haltérophilie permettrait d’atteindre des objectifs de rééducation plus rapidement que d’autres. C’est donc un outil intéressant, mais absolument pas indispensable

  • INTÉGRER DE LA VITESSE

Beaucoup d’exercices de rééducation se caractérisent par un contrôle précis et lent du mouvement. Ces exercices permettent souvent aux patients de de respecter certains objectifs, mais s’éloignent parfois des contraintes réelles auxquels ils sont exposés dans leurs activités professionnelles, loisirs et/ou sportives. L’haltérophilie permet de travailler sur des techniques d’accélération optimale d’une charge externe.

  • COORDINATION

Les mouvements d’haltérophilie sont globaux. Bien que certains mouvement semi-techniques peuvent insister sur le travail d’une partie du corps plus qu’une autre, on a toujours une composante au moins isométrique de chaque partie du corps. Ce recrutement global reflète plus les contraintes d’activités fonctionnelles.

  • EFFICIENCE

L’exposition à la charge oblige le patient à « faire mieux ». Lorsqu’il réalise le mouvement correctement, il retrouve les sensations de mouvement réussi à moindre coût énergétique, en comparaison aux tentatives moins bien réussies. Cette recherche de performance dans l’exercice peut aussi se transférer dans les actions propres à ses activités.

  • COMPÉTITION

Les exercices d’haltérophilie peuvent se faire avec un bâton en bois, notamment pour la partie éducative, mais dès lors que le patient est capable de travailler avec une charge, le fait de réussir ses exercices avec des poids plus importants est une réussite qu’ils pourront apprécier.

   

4. Cas clinique

     Sur instagram, j’ai partagé le cas de 3 patients avec qui j’utilise de l’haltérophilie en rééducation :

 

  • Cas N°1 :

     Travail de la triple extension chez un patient opéré des ligaments croisés. Dans la vidéo on utilise le tirage haut d’arraché pour stimuler le recrutement de la triple extension avec de la vitesse et l’intention d’amener la barre la plus haute possible.

  • Cas N°2 :

     Travail de stabilité en position d’overhead  lors de la réception d’un arraché. Le travail d’arraché réception jambe tendue, puis en réception avec un quart de squat augmente progressivement l’instabilité à la réception et expose la patiente graduellement à cette difficulté.

  • Cas N°3 :

     Travail de réathlétisation suite à une luxation du coude. Dans cette vidéo, le exercices d’haltérophilie sont utilisés en complexe, c’est-à-dire qu’on enchaîne plusieurs exercices différents dans la même séquence de mouvement pour demander au patient de travailler en tirage, en poussées, et surtout de garder un contrôle de son coude sous fatigue.

     Si vous avez des questions sur cet article ou ce sujet, n’hésitez pas à nous contacter !

     Bibliographie

Storey, A. and Smith, H.K., 2012. Unique aspects of competitive weightlifting: Performance, training and physiology. Sports Medicine [Online], 42(9), pp.769–790. Available from: https://doi.org/10.2165/11633000-000000000-00000.

Suchomel, T.J., Comfort, P. and Stone, M.H., 2015. Weightlifting Pulling Derivatives: Rationale for Implementation and Application. Sports Medicine [Online], 45(6), pp.823–839. Available from: https://doi.org/10.1007/s40279-015-0314-y.

Suchomel, T.J., McKeever, S.M. and Comfort, P., 2020. Training With Weightlifting Derivatives: The Effects of Force and Velocity Overload Stimuli. Journal of Strength and Conditioning Research [Online], 34(7), pp.1808–1818. Available from: https://doi.org/10.1519/JSC.0000000000003639.